Country report and updates: Austria

Last revision: 07 avr 2016
07 avr 2016

actualisés février 2016

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Situation

  • Le droit à l'objection de conscience est reconnu uniquement aux conscrits. Il doit être exercé avant l'appel sous les drapeaux ou plus de trois ans après la fin du service militaire.

  • Les personnes qui se sont portées volontaires pour rejoindre l'armée (militaires professionnels) n'ont pas droit à l'objection de conscience.

Recrutement des militaires

En Autriche, la conscription reste en vigueur, bien que les militaires professionnels représentent près de 50 % des effectifs. Selon les estimations de la Bundesheer autrichienne, les forces armées comptent 16 000 militaires professionnels et environ 17 000 conscrits, soit au total 35 000 soldats1.

À l'occasion d'un référendum organisé le 20 janvier 2013, une majorité des citoyens autrichiens (près de 60 %) s'est exprimée en faveur du maintien de la conscription2.

Conscription et exemptions

La conscription est inscrite dans l'Art. 9(a) par. 3 de la Constitution (modifié en 2002), qui prévoit que tout citoyen de sexe masculin est soumis au service militaire3. Son utilisation a aujourd'hui pour fondement juridique la Loi sur la défense (Wehrgesetz)4 de 2001.

Aux termes des dispositions actuellement en vigueur, tous les citoyens de sexe masculin résidant en Autriche ont l'obligation de se faire recenser pour le service militaire au cours de l'année de leurs 18 ans. Les seules exceptions absolues touchent les prêtres, les religieux, les étudiants en théologie se destinant à la carrière ecclésiastique ou ceux qui, en cours de ce type d’études, ont une activité pastorale ou dispensent un enseignement religieux – à condition qu'ils soient membres de "religions officiellement reconnues"5. Dans les affaires Gütll c. Autriche et Löffelmann c. Autriche6, la Cour européenne des droits de l'homme a reconnu l'État coupable d'une violation parce que les Témoins de Jéhovah, qui n'ont que le statut de "communauté religieuse enregistrée", ne bénéficient pas de l'exemption complète accordée aux membres des Églises officiellement reconnues.

Dès son dix-septième anniversaire, le citoyen peut s'attendre à être convoqué pour le recensement et, avec le consentement d'un parent ou tuteur, il peut choisir de s'engager pour le service militaire obligatoire avant son dix-huitième anniversaire. Un citoyen ne peut être contraint à s'engager pour le service militaire qu'une fois son dix-huitième anniversaire révolu. Le Comité des droits de l'enfant, dans ses observations finales sur le rapport initial de l'Autriche aux termes du Protocole facultatif relatif à la Convention des droits de l'enfant concernant l'implication d'enfants dans les conflits armés (OP/CAC), a fait observer que "la section 9, paragraphe 2 de la loi sur la défense nationale fixe à 17 ans l'âge minimum pour le recrutement volontaire". Il a par ailleurs recommandé que "l'État partie envisage la possibilité d'élever l'âge minimum du recrutement volontaire à 18 ans"7. Dans une réponse écrite8, l'Autriche a indiqué ne pas adopter cette recommandation.

La durée du service militaire est actuellement de six mois.

Un citoyen soumis au service militaire qui a sa résidence principale hors d'Autriche doit se présenter à l'ambassade ou au consulat le plus proche. S'il retourne vivre en Autriche avant d'avoir 35 ans révolus, il doit se présenter au quartier général militaire de sa région dans un délai de trois semaines. Les double-nationaux "qui remplissent les conditions du Protocole de La Haye" doivent fournir la preuve qu'ils ont déjà accompli le service militaire obligatoire dans un autre État contractant.

Militaires professionnels

Le service des militaires professionnels (des sous-officiers aux officiers) est régi par la loi relative au statut des fonctionnaires (Beamten-Dienstrechtsgesetz) de 1979 et par la loi relative aux employés contractuels (Vertragsbedienstetengesetz) de 1948. Aucune de ces lois ne réglemente spécifiquement le service militaire, mais elles s'appliquent aux militaires professionnels ayant la qualité de fonctionnaires (Beamte) ou sous contrat9.

Les conscrits ayant terminé leur service militaire ont en outre la possibilité de poursuivre leur engagement pendant six mois, conformément à l'Article 23 de la Wehrgesetz de 2001.

Aux termes de l'Article 37 de la Wehrgesetz, les femmes et les conscrits qui s'engagent volontairement peuvent aussi effectuer un "service de formation" de 12 mois, reconductible pour six mois maximum. Il est possible de quitter ce service à tout moment ; la demande prend effet à la fin du mois auquel elle a été formulée (Article 37 paragraphe 3). Néanmoins, les personnes soumises à la conscription doivent servir au minimum six mois, ou effectuer un service militaire de base pour aller au bout de leur période de conscription (Article 38b).

D'après des informations communiquées par la Arbeitsgemeinschaft Wehrdienstverweigerung autrichienne, l'armée dispose d'agents de liaison pour chaque école secondaire et université, et participe aux "journées d'information" qui ont lieu le dernier jour de l'année scolaire. Elle rencontre toutefois des difficultés à recruter un nombre suffisant de militaires professionnels ayant un bon niveau d'instruction10.

Objection de conscience

Objection de conscience pour les conscrits

Le droit à l'objection de conscience (OC) est légalement reconnu depuis 1974. Il est prévu à l'Article 9(a) de la Constitution, qui stipule que les citoyens refusant d'effectuer leur service militaire pour des raisons de conscience doivent accomplir un service de remplacement. Son fondement juridique est également établi par la Loi sur le service civil (Zivildienstgesetz) de 198611.

On peut penser que la convocation au recensement pour le service militaire est accompagnée d'une information écrite sur la possibilité d'un service civil pour les objecteurs de conscience. Toutefois, on ne trouve aucune mention ni aucune trace de l'objection de conscience ou du service civil dans la section du site Internet du Ministère de la défense contenant les informations destinées aux recrues12 ; pour les trouver, un objecteur de conscience doit consulter le site de l'administration du service civil (Zivildienstverwaltung).

La loi reconnaît le droit à l'objection de conscience pour des motifs religieux comme non-religieux. Selon l'Article 2 de la Loi sur le service civil, le droit à l'objection de conscience s'applique aux personnes qui "ne sont pas en mesure d'accomplir le service militaire, car elles refusent, pour des motifs de conscience, d'user de la force armée contre des êtres humains – sauf en cas de défense personnelle – et que par conséquent, en accomplissant le service militaire, elles se trouveraient confrontés à un conflit de conscience".

En revanche, les citoyens servant dans la Bundesheer autrichienne (forces armées), qu'ils soient conscrits ou volontaires, ne disposent pas du droit à l'objection de conscience et au transfert dans le service civil.

Les demandes d'octroi du statut d'objecteur de conscience doivent être soumises dans des délais stricts (Article 2.2 de la Loi sur le service civil).

Elles doivent être soumises dans les six mois suivant la réception de l'avis d'aptitude au service militaire, et au minimum deux jours avant la réception de l'appel sous les drapeaux.

Les conscrits en service ne peuvent pas déposer de demande avant la fin de leur service militaire et pendant les trois ans suivant le jour de leur première mobilisation.

Les demandes doivent être adressées au Ministère de l'intérieur. Ce dernier met à disposition un modèle de déclaration, par le biais duquel le requérant déclare accepter les termes de l'Article 2 de la Loi sur le service civil. Ce modèle peut être téléchargé depuis le site Web de l'administration du service civil13.

Depuis 1991, aucun entretien individuel n'est organisé. Toutes les demandes sont presque automatiquement acceptées, pourvu qu'elles aient été soumises dans le temps imparti. Une demande peut être rejetée si le requérant a été condamné pour une infraction pénale, s'il fait partie de la police d'État, s'il possède un permis de port d'armes ou si ses objections à l'usage de la violence sont considérées comme conditionnelles et à caractère politique (Loi sur le service civil, Article 5(a)).

Il est possible de faire appel d'un refus auprès d'un tribunal civil.

Service de remplacement

La durée du service de remplacement est de 9 mois (depuis le 1er janvier 2006). Il est donc 1,5 fois plus long que le service militaire.

Le service de remplacement est géré par le Ministère de l'intérieur. Il peut être accompli auprès de diverses institutions du secteur public telles que les hôpitaux, les services d'action sociale et les services de secours d'urgence, ou encore auprès d'organisations non gouvernementales comme la Croix-Rouge.

Les objecteurs de conscience ont également la possibilité de réaliser un service volontaire à l'étranger de 12 mois. Ce service, qui consiste généralement en des actions pour la paix ou la communauté, les exempte du service de remplacement.

Une fois le service de remplacement accompli, les OC sont considérés réservistes jusqu'à l'âge de 50 ans. En temps de guerre ou de danger public, les OC peuvent être appelés pour accomplir un "service civil exceptionnel", c'est-à-dire pour exécuter des tâches diverses n'impliquant pas le port d'armes, telles qu'apporter une aide d'urgence (Loi sur le service civil, Article 21). Pour l'heure, aucun OC n'a jamais été appelé pour servir dans la réserve.

En 2000, le gouvernement a considérablement réduit la rémunération des OC. Avant cette date, la rémunération des OC était versée par le gouvernement et était à peu près identique à celle des conscrits des forces armées. Aujourd'hui, elle est en partie versée par l'organisme qui les emploie. Le gouvernement fixe des directives de rémunération appropriée, mais celles-ci sont très faibles et il en résulte une baisse de 50 % du traitement pour les OC. Des groupes d'OC autrichiens ont déposé plusieurs plaintes auprès de la Cour constitutionnelle. Cette dernière a déclaré que les nouvelles réglementations en matière de rémunération constituaient une violation du droit à la liberté de choix entre le service militaire et le service civil. Mais comme elle n'a pas désigné l'organisme chargé d'augmenter le traitement des OC, la situation n'est pas encore réglée. Par conséquent, concrètement, la rémunération des OC demeure bien inférieure à celle des conscrits des forces armées14.

Pour son cinquième rapport au Conseil des droits de l'homme, dans le cadre de l'Examen Périodique Universel de 201515, l'Autriche était invitée à justifier de "la différence de durée entre le service de remplacement civil pour les objecteurs de conscience et le service militaire". L'Autriche a répondu que les "avantages" du service civil (notamment l'absence d'uniforme, le non-assujettissement au droit militaire, une vie hors les casernes, ainsi qu'un "degré d'effort physique" demandé moindre) devait être compensé par l'extension de la durée du service de remplacement.

Restrictions

Aux termes de l'Article 5a(1) de la Loi, ceux qui ont été inculpés et condamnés à plus de six mois de prison pour une infraction comprenant des actes ou des menaces de violence avec une arme à feu ou des explosifs sont exclus en permanence du service civil.

Les membres des forces de l'ordre (Wachkörper) sont aussi exclus du service civil (Article 5a(2)), de même que ceux possédant un permis de port d'armes (Article 6(3)(3)), et cela sans doute parce qu'ils ne peuvent pas être réfractaires au port d'une arme. On voit donc que la liste des motifs d'objection de conscience est restreinte.

Objection de conscience pour les militaires professionnels

Il n'existe pas de fondement juridique pour le droit à l'objection de conscience pour les militaires professionnels16. La Loi sur le service civil s'applique uniquement aux conscrits et ne comporte aucune disposition relative aux militaires professionnels.

La loi relative au statut des fonctionnaires et celle relative aux employés contractuels définissent les conditions sous lesquelles les fonctionnaires, et donc les militaires professionnels, peuvent demander la fin anticipée de leur service actif. L'Article 21 de la loi relative au statut des fonctionnaires donne la possibilité aux militaires de carrière (les "Beamte") de démissionner en respectant un préavis d'un mois. Si le militaire participe à une opération pour laquelle il a perçu une rémunération supplémentaire (conformément à la loi relative aux primes opérationnelles, ou Einsatzzulagengesetz, de 1992), sa demande ne prend effet qu'à la fin du mois suivant la fin de cette opération. Cette politique ne garantit pas le droit à un départ anticipé pour raisons de conscience. Elle complique même le départ des forces armées au moment où un conflit de conscience aurait le plus de chance de surgir.

Aux termes de la loi applicable aux employés contractuels (Vertragsbedienstetengesetz), les militaires professionnels sous contrat ont la possibilité de dénoncer le contrat qui les lie à tout moment. La durée du préavis dépend du temps de service qu'ils ont accompli (Article 33). Dans certains cas, il se peut que les frais de formation doivent être remboursés (Article 30 paragraphe 5).

Informations générales

Dans les années 1990, de nombreuses demandes d'octroi du statut d'objecteur ont été rejetées, au motif qu'elles n'avaient pas été soumises dans les délais. Ces objecteurs ont continué de refuser d'accomplir leur service militaire et se sont vus condamnés à des peines d'emprisonnement pouvant aller jusqu'à un an, en vertu du Code pénal militaire et sur la base d'un refus de répondre à un ordre d'appel sous les drapeaux. Vers 1997, cette situation a suscité un vif intérêt à l'échelle internationale. Certains OC ont même été adoptés en tant que prisonniers d'opinion par Amnesty International. En 1997, le tribunal du District de Schwechat acquitta un OC de ces chefs d'accusation. Il décida qu'on ne pouvait reprocher à l'OC d'avoir ignoré l'existence de délais spécifiques puisque, notamment, les autorités n'avaient fait aucun effort particulier pour en informer le public.

Depuis 1998, il n'existe aucun cas connu d'emprisonnement d'OC pour soumission hors délai d'une demande d'objection17.

Refus de répondre à l'appel sous les drapeaux et désertion

Peines

Le refus de répondre à l'appel sous les drapeaux et la désertion sont condamnés en vertu du Code pénal militaire18.

Le fait de ne pas répondre à un appel sous 30 jours est passible de trois mois d'emprisonnement ou d'amende (section 7 (1)). Au-delà de 30 jours, la peine peut atteindre un an d'emprisonnement (section 7 (2)).

Le refus répété de désobéir à des ordres militaires est passible de 2 ans d'emprisonnement maximum (section 12 (1) 2).

En pratique

Les réfractaires sont condamnés à une peine de 2 à 6 mois d'emprisonnement. Il n'existe aucun cas connu de réfractaires ces dernières années19.

Remerciements

Cette mise à jour de 2016 a été réalisée conjointement avec l'International Fellowship of Reconciliation, grâce aux recherches qu'il a menées dans le cadre de l'Examen Périodique Universel, pour son rapport de 2015 sur l'Autriche.

1Österreichisches Bundesheer, http://www.bmlv.gv.at/truppendienst/milint/td_milint-laenderinfo.php?id_c=96&table_id=2, consulté le 12 février 2008

2 Deutsche Welle, Austria bucks trend with conscription vote, 21 janvier 2013, consulté le 24 février 2016

3 Version anglaise : http://www.legislationline.org/upload/legislations/7d/0e/9533b7bfafda8e640a82346ab246.pdf, consulté le 12 février 2008

4 http://wattheure/pdf_pool/gesetze/wg2001.pdf, consulté le 12 février 2008

5 Voir par. 290 à 320 du rapport de l'État partie (CCPR/C/AUT/4) et la liste accessible à l'adresse http://www.help.gv.at/Content.Node/82/Seite.820100.html, consultée le 05 mars 2008. Les appelés pratiquants doivent fournir des certificats des autorités religieuses compétentes.

6 Requêtes n° 49686/99 et 42967/98 ; arrêt du 12 mars 2009

7 Document des Nations Unies Réf. CRC/C/OPAC/CO/2, janvier 2005, par 5 et 6.

8 A/HRC/17/8/Add.1

9 Réponse du Bundesministerium für Landesverteidigung à un questionnaire de l'IRG, GZ S91099/3-GrpRechtLeg/2008, 19 février 2008 ; voir également Article 1 paragraphe 2 du Wehrgesetz 2001

10 Arbeitsgemeinschaft Wehrdiensverweigerung, réponse à un e-mail de l'Internationale des résistant(e)s à la guerre, 18 février 2008.

11 La législation en vigueur actuellement est la loi révisée n° 679/1986, qui a connu des amendements par la suite, dont le plus récent est la loi n° 106/2005. Informations : http://www.zivildienstverwaltung.at/material/ZDG_40_2006.pdf

12 www.bmlv.gv.at/rekrut

13 http://www.zivildienstverwaltung.at/material/Zivildiensterklaerung.pdf.

14 www.zivildienst.at(Union autrichienne des objecteurs de conscience).

15 Ce rapport peut être consulté à l'adresse /Austria-UPR-2015.

16 Exercice du droit à l'objection de conscience au service militaire dans les États membres du Conseil de l'Europe, Commission des questions juridiques et des droits de l'homme, Doc. 8809 (Révisé), 4 mai 2001.

17 Amnesty International : Conscientious objection to military service: A summary of current concerns (EUR 13/001/1997).

18 Amnesty International 1997.

19 Silvestri, A. 1993. Conscientious objection to military service: a regional human right? Institut Universitaire de Hautes Etudes Internationales, Genève , Internationale des résistant(e)s à la guerre 1990. Rapport par pays - Autriche IRG, Londres

Recent stories on conscientious objection: Austria

22 fév 2007

Exposé à l'intention de la 89ème session du Comité des droits de l'homme

RÉSUMÉ :

L'objection de conscience a été reconnue juridiquement en même temps que le service militaire obligatoire par l'Etat autrichien moderne. Mais les dispositions législatives actuelles donnent lieu à de graves préoccupations.

Informations générales

Le Traité de Versailles 1919 interdisait à l'Autriche de maintenir la conscription. De 1938 à 1945, la conscription dans l'armée allemande devint obligatoire.