Racisme et citoyenneté

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Heavily armed police pointing guns move towards a black person with their hands raised.  The back of a street sign reads 'Fuck the Police'.
Policing at the demonstrations in Ferguson, United States, protesting the murder of the unarmed black teenager Michael Brown by a police officer

L’esprit militarisé est entrainé à voir les dangers, ce qui signifie voir des environs remplis d’ennemis potentiels qui, à travers de cette lentille, sont déshumanisés ou perçus comme « différents ». Ceux qui sont identifiés comme ennemis potentiels sont presque toujours, pour une raison ou une autre, sur les marges de la société, qu’ils soient activistes politiques, dissidents sociaux, personne non-conformiste ou pauvre. Mais, ils seront presque toujours perçus comme différents en termes racialisés. La militarisation du maintien de l’ordre est une militarisation contre les groupes de minorités ethniques et de personnes de couleur dans le monde entier.

La « guerre contre la terreur » a haussé le spectre d’une menace Islamique, et est utilisé afin de justifier la militarisation du maintien de l’ordre qui cible les communautés musulmanes. Les groupes indigènes, tels que les Mapuche au Chili, sont traités différemment car ils protègent leur terre et ressources. Des quartiers entiers peuplés de personnes de couleurs tels que les favelas de Rio de Janeiro sont considérés un danger à la cohésion sociale, alors que la couleur de peau noire ou foncée est confuse avec l’idée de criminalité combiné avec de la violence. Le maintien de l’ordre militarisé est utilisé afin de soutenir et maintenir les occupations coloniales des terres d’un groupe ethnique par un autre, tel qu’en Palestine. Le maintien de l’ordre militarisé n’est autre que du « racisme militarisé » (Linke, 2010).

Les frontières militarisées définissent qui est ou qui n’est pas un citoyen : qui a des droits et mérite la protection de l’Etat et qui est une menace à l’ordre social. La Zone Schengen permet le déplacement libre des gens (et bien sûr de capital) dans la Forteresse Europe tandis que ceux qui ne sont pas désirés se noient sur ses rives. Dans « l’état de sécurité émergente, les privilèges sont maintenus en limitant les déplacements à travers la violence. (Jones, 2016). Le régime de frontières militarisés est “basé sur l’exclusion des personnes de couleur noire et marron » (Segatntini, 2017) et « soutien des notions culturelles de valeur humaine relative » (Linke, 2010). Cela opère « comme une zone tampon amorphe contre la mobilité globale et la menace présumée de race » (Linke, 2010).

La militarisation des frontières prend place « non en réponse à une menace militaire, mais est concentrée entièrement sur la limitation du mouvement des civils. » (Jones, 2016). Les migrants eux-mêmes deviennent la menace, « systématiquement décrit comme « illégaux » et présentés… comme un paquet de problèmes qui a besoin d’être résolu de la même façon que le crime, le terrorisme ou la drogue » (Demblon, 2015). Sur la chaîne d’infos australienne, des images de demandeurs d’asile les représente exclusivement comme étant « dans des bateaux, escortés en train de monter ou de descendre de différents moyens de transport et derrière des barrières de centres de détention (qui, visuellement, ont généralement le même aspect que des prisons) … l’usage de gants de latex par les autorités quand ils conduisent des recherches sur des demandeurs d’asile invoque l’idée de saleté et de maladie ». Stewart prétend que « la représentation des demandeurs d’asile en tant que « problème » et une « menace » dans les médias australiennes a transformé les demandeurs d’asile en problème à laquelle une solution militaire est requise (Stewart, 2016). L’Etat « se satisfait d’être complice » dans cette narrative ; « il préfèrerait plutôt de bénéficier du sentiment croissant de racisme et en capitalisant sur son pouvoir quasiment non-vérifié d’approfondir la militarisation et la surveillance sans l’obstruction ingérable de la résistance et contestation publique » (Pimentel, 2016).

Rosas décrit « l’épaississement des frontières » ou la militarisation des frontières s’étend au-delà des frontières physiques aux « frontières intérieures ». Des conducteurs sur la frontière entre les Etats-Unis et le Mexique peuvent tomber sur un point de contrôle de Patrouille de Frontière et peuvent être interrogés sur leur statut d’immigration n’importe où du moment que ce soit à cent miles de la frontière, une zone dans laquelle six millions de personnes habitent. Le profilage racial signifie que les immigrés de couleur de peau foncée et bien trop souvent leurs homologues citoyens sont sujets au maintien de l’ordre de la division entre les Etats-Unis et le Mexique, bien loin de la frontière internationale » (Rosas, 2015). La criminalisation raciste de la migration a « transformée tous les individus de couleur de peau foncée en de suspects potentiels » (Linke, 2010).

En Afrique du Sud, la police a répondu à une série d’attaques xénophobes en 2015 avec la police et les militaires occupant « les rues dans des zones sensibles avec des véhicules de transport blindés » et en effectuant des arrestations en masse. Mais « en pratique, les migrants sans papiers étaient autant les cibles que les suspects impliqués dans la violence xénophobe » et l’opération a maintenant été élargie à « adresser les organisations de drogue, de prostitution et d’emplois illégaux de terrains et d’immeubles par des squatters ». Cette « réponse de facto militarisée intègre la politique de frontières externes avec le contrôle social domestique » (McMichael, 2015). La sécurité des frontières est « mêlées à la militarisation de la société civile » (Linke, 2010). La « sécurisation de l’immigration produit une « insécurisation » subséquente des communautés immigrées et les [autres] citoyens marginalisés sont trop souvent dans des dynamiques de routines de politiques, détention et de déportation qui frôle la terreur d’Etat » (Rosas, 2015).

La politique militarisée est censée rendre la société plus sûre, mais la sécurité qui devrait s’assurer que la sécurité de groupes sélectionnées dans la société le fait au coût de ceux qui ne sont pas considérés assez importants pour vivre en sécurité et en paix. Nous ne sommes pas attendus à interroger quels individus sont protégés. Le maintien de l’ordre militarisé n’a pas protégé Tamir Rice, un enfant noir qui fut abattu par la police à Cleveland aux Etats-Unis ; en 2014, pour avoir joué avec un pistolet-jouet. En Papouasie occidentale, loin d’assurer la sûreté, la “Papouasie occidentale est moins sûre pour les Papous à cause de la police indonésienne. La police est devenue la principale actrice perpétrant les violations de droits humains contre les Papous occidentaux » (MacLeod, Moiwend et Pilbrow, 2016).

 

“Casspir” est un projet aux facettes multiples, comprenant installation, photographie, histoire orale et documentaire. Cette entreprise artistique se base avant-tout sur un principe de ré-appropriation face à l’héritage de la violence d’Etat en Afrique du Sud symbolisé par le véhicule de combat “Casspir”. Il s’agit de réhabiliter un de ces véhicules en le couvrant d’un tissage de perles de verre au couleurs vives et au motifs traditionnels, réalisé par des artisans du Zimbabwe et de la province sud-africaine du Mpumalanga où les femmes de la tribu Ndebele sont reconnues pour leur savoir-faire.

La face visible de la militarisation policière est l’utilisation d’équipement militaire et de gilet pare-balles ; de fusils de précision et de tanks faisant face aux manifestants de Ferguson, aux Etats-Unis, et de véhicules lourdement blindés patrouillant les rues des favelas de Rio de Janeiro. Mais une telle visible militarisation est seulement un symptôme – un produit final – d’un état d’esprit militarisé qui voit ceux qui bénéficient du maintien de l’ordre non comme les membres d’une communauté ayant besoin d’être protégée mais comme une menace.

Le 23 Juin 2016 Michelle Bachelet, Présidente du Chili, a dévoilé son nouveau « Plan de reconnaissance et de développement de l’Araucanie », s’excusant pour « avoir échoué en tant que pays », et pour les « horreurs et erreurs » commises par l’État chilien contre les peuples indigènes. Cependant, même cette reconnaissance tardive, dans les conséquences de son second gouvernement et après avoir poussé à la criminalisation des Mapuches avec l’application de la « loi antiterroristes » dans la zone où ils vivent, nous pensons qu’il est nécessaire que nous fassions une pause afin de comprendre les intentions réelles du gouvernement.

David Scheuing

Londres. Tous les jours, en rentrant chez moi, je passe devant des policiers lourdement armés qui
« protègent » les citoyens, les infrastructures, la vie et l’économie : dans le métro, à la gare, ils sont toujours aux aguets. Toutefois, cette vigilance n’est ni inoffensive, ni innocente. Elle tue. Cette année, juillet marquait le dixième anniversaire du meurtre de Jean Charles de Menezes dans une rame de métro bondée à la station Stockwell de Londres.1

Pedro Rios

Le soir du 28 mai 2015, à San Diego (Californie) une centaine de personnes s’était rassemblée dans une marche commémorant la Journée nationale d’action pour arrêter les violences à la frontière. Cette manifestation entrait dans le cadre d’une série de différentes actions nonviolentes, coordonnées dans neuf villes des États-Unis afin de faire entendre les voix contre l’augmentation de l’impunité des agents aux frontières, impliqués dans au moins 39 morts depuis 2010. Menées par le Collectif des communautés de la frontière sud, qui regroupe plus de 65 associations travaillant sur la frontière avec le Mexique, les marches, rassemblements et projections de films mettait en vedette le cinquième anniversaire du décès d’Anastasio Hernandez Rojas, père de cinq enfants, qui en 2010 fut torturé à mort par plus de douze agents des frontières à San Ysidoro, porte d’entrée dans San Diego.

Christopher McMichael

La politique officielle du gouvernement d’Afrique du Sud en ce qui concerne les frontières et l’immigration utilise la langue des Droits de l’Homme et ouvre les frontières de l’époque coloniale en Afrique. Mais la réalité est plus autoritaire et brutale- les migrants économiques et les demandeurs d’asile, en particulier en provenance d’autres pays Africains, font régulièrement l’objet du harcèlement violent de la police, et sont illégalement empêchés d’accéder à des services essentiels tels que des hôpitaux ou sont envoyés dans des maisons d’arrêt. Les représentants officiels de l’Etat sont réputés pour leurs belles paroles sur la sécurité aux frontières et ne cessent de faire des déclarations dramatiques sur les menaces de l’étranger envers la patrie Sud Africaine, des trafiquants internationaux de drogue aux braconniers de rhinocéros.

Cesar Padilla, Observatoire des Conflits Miniers d'Amérique latine, OCMAL

Cela n'est pas une nouveauté: l'extractivisme en Amérique latine ne cesse d'imposer un modèle d'extraction et d'exportation toujours plus fort. La majorité des pays de la région est touchée par une course aux investissements dans le secteur minier, pétrolier, forestier ou maritime.

Toutefois, l'extractivisme est de plus en plus contesté de parts et d'autres de la société – notamment par l'académie et les mouvements sociaux.

A l’heure de la mondialisation, toute analyse d’idéologies de militarisation et répression, méthodologies et technologies, doit prendre en considération les dynamiques d’import et export de ces concepts et outils à travers les frontières. L’un des plus importants exportateurs d’idéologie et technologie de répression au monde est sans aucun doute Israël.

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