Turquie : le Groupe de travail des Nations Unies sur la détention arbitraire qualifie l'emprisonnement de Halil Savda de « arbitraire »

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Tout emprisonnement d'objecteurs de conscience peut maintenant relever de la détention arbitraire.


Une victoire juridique supplémentaire dans la série en faveur des objecteur de conscience de Turquie : le Groupe de travail des Nations Unies sur la détention arbitraire a examiné le cas de l'objecteur de conscience turque Halil Savda lors de sa session du 9 mai 2008. Il conclut : « la privation de liberté de M. Halil Savda au cours des périodes du 16 au 28 décembre 2004, du 7 décembre 2006 au 2 février 2007, ainsi que du 5 février au 28 juillet 2007 était arbitraire. Sa privation de liberté depuis le 27 mars 2008 est aussi arbitraire, contrevenant aux articles 9 et 18 de la Déclaration universelle des droits de l'homme et aux articles 9 et 18 du Pacte international relatif aux droits civils et politique  ». Halil Savda effectue actuellement une condamnation à la prison ferme, mais a été déclaré inapte au service militaire. Au moins, cette condamnation sera ainsi la dernière dans le cadre de son objection de conscience au service militaire.

Ce n'est pas la première fois que le Groupe de travail sur les détentions arbitraires se penche sur la détention d'objecteurs de conscience. En 1999, le Groupe de travail a publié un avis sur l'emprisonnement répété de l'objecteur de conscience turque Osman Murat Ülke (avis no 36/1999). En 2003, le Groupe de travail a examiné plusieurs affaires concernant des objecteurs de conscience israéliens (avis no 24/2003). Pour tous, la conclusion du Groupe de travail est que tout emprisonnement d'un objecteur de conscience ayant déjà subi à ce titre un emprisonnement initial doit être considéré comme arbitraire, violant le principe de ne bis in idem, lequel interdit la répétition des condamnations pour une seule infraction. Dans son avis relatif à Israël, le Groupe de travail indique : « La deuxième privation de liberté et les suivantes qui ont été infligées à Matan Kaminer, Adam Maor, Noam Bahat et Jonathan Ben-Artzi sont contraires au paragraphe 7 de l’article 14 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques. Le non-respect de normes internationales relatives au droit à un jugement équitable est d’une gravité telle qu’elle confère à la privation de liberté un caractère arbitraire, [...]  ». Dans son avis concernant le cas de Halil Savda, le Groupe de travail va plus loin en indiquant que toute privation de liberté doit être considérée comme arbitraire. Suite à la décision du Comité des droits de l'homme du 23 janvier 2007 relative aux cas de deux Sud-coréens qui spécifie clairement que les états ont une obligation de reconnaître l'objection de conscience, et que ne pas reconnaître ce droit constitue une violation de l'article 18 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques (cf Objo-Infos no 27 de février/mars 2007), le Groupe de travail aussi considère toute détention d'un objecteur de conscience comme résultante d'une violation de l'article 18, et donc comme étant arbitraire.

Ceci est une bonne nouvelle pour les objecteurs de conscience dans les pays où leur droit n'est pas reconnu, car il conforte le corpus des jugements et des avis d'instance internationales statuant très clairement sur l'existence d'un droit à l'objection de conscience en droit international. Malheureusement, les effets ne sont pas immédiats. Les avis du Groupe de travail sur la détention arbitraire ne sont pas contraignants (contrairement aux jugements du Comité des droits de l'homme pour des plaintes individuelles) ; ainsi, ce nouvel avis du Groupe de travail à propos d'Halil Savda ne conduit pas à une sortie de prison pour Halil Savda. Mais il ajoute à la pression exercée sur le gouvernement turque pour qu'il solutionne la problématique de l'objection de conscience.

Sources : Groupe de travail sur la détention arbitraire : avis no 16/2008 (Turquie), avis no 36/1999 (Turquie), avis no 24/2003 (Israël).

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