Nonviolence Handbook

en

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Durée : 15 minutes au minimum.

Objectif ou visée de l'exercice : donner l'opportunité aux personnes de résoudre un conflit ou une dispute en recourant à la non-violence. Expérimenter dans la pratique ce que l'on ressent dans chacune des postures lors d'un conflit. C'est un bon exercice introductif à de nombreuses situations.

Mode d'emploi/Notes pour la facilitation

Demandez aux participant/e/s de se placer en deux files formées d'un même nombre de personnes, face à face. (Vous pouvez ajouter une autre file pour une fonction d'observation.) Demandez à chacun de montrer la personne qui est en face d'elle, pour confirmer avec qui vont se dérouler les échanges. Expliquez qu'il n'existe que deux rôles dans cet exercice : chaque personne d'une ligne assume un même rôle et celles d'en face assument l'autre ; chacun n'est en lien qu'avec la personne qui se trouve juste en face. Expliquez en quoi consiste chacun des deux rôles, décrivez le conflit et décidez qui commencera. Laissez quelques secondes de silence aux participant/e/s pour qu'elles/ils se mettent dans leurs rôles, puis dites-leur de démarrer. En fonction de la situation, il peut s'agir d'une courte dispute (moins d'une minute) ou vous pouvez aussi la laisser se prolonger, mais pas plus de trois à quatre minutes.

Dites alors « Stop » et mettez à plat (debrief). Les questions de mise à plat peuvent inclure : ce que les personnes ont fait, comment elles se sont senties, quels moyens elles ont trouvé pour résoudre le conflit ou s'en accommoder, ce qu'elles ont noté quant au langage du corps, ce qu'elles auraient aimé faire, etc. (Si vous disposez d'une file d'observatrices/-teurs, demandez-leur alors ce qu'elles/ils ont vu.)

Refaites l'exercice, en inversant les rôles. Afin que ce ne soient pas les mêmes personnes qui interagissent, décalez une des deux files en demandant à la personne qui se trouve à une extrémité de venir se placer à l'autre bout, faisant ainsi glisser toute la file d'une unité. Exemples de rôles

Quelqu'un prévoyant de s'engager dans l'action non-violente/quelqu'un de proche et d'opposé à une telle participation

Quelqu'un qui bloque une structure liée au commerce des armes ou gouvernementale / un employé mécontent

Manifestant/e / contre-manifestant/e ou passant mécontent

Participant/e à une action assumant des lignes directrices non-violentes / participant/e ne respectant pas les lignes directrices non-violentes

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1) Assurez-vous que l'espace où aura lieu la formation soit suffisamment vaste pour que les participant/e/s puissent pratiquer des jeux de rôles et des exercices, ainsi que s'asseoir en cercle, et qu'il est accessible au public concerné.

2) Assurez-vous de la présence d'un tableau ou de papier pour écrire.

3) Le manger et le boire sont importants ; assurez-vous que quelqu'un en soit responsable ou qu'il ait été demandé aux participant/e/s d'apporter quelque chose à partager.

4) La présentation/proposition préalable doit comporter une description claire de la formation et la nécessité d'une participation complète, sa durée, etc.

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Andreas Speck

Introduction

Depuis 2001, l'Internationale des résistant/e/s à la guerre a coordonné des activités internationales autour du 15 mai, la Journée internationale de l'objection de conscience. Ce jour a d'abord été célébré en 1982 comme une journée européenne de l'objection de conscience, mais il l'est internationalement depuis 1986. L'IRG voit en ces activités autour du 15 mai une occasion pour que les militant/e/s de l'objection de conscience fassent part de leur expérience et apprennent des luttes et des campagnes menées par d'autres. Depuis 2002, ces activités incluent un événement international, comportant souvent une formation à la non-violence et une action non-violente comme éléments essentiels.

Activités (2002-2007)

Le premier événement de ce type a eu lieu en 2002 en Belgique. L'action qui avait été prévue était le blocage du quartier général de l'Otan le 15 mai. Si l'objet même de l'action avait été décidé à l'avance, le déroulement complet de l'action a été planifié pendant une semaine de rassemblement, avec des participant/e/s de Belgique, Grande-Bretagne, Allemagne, France, Pays-Bas, Espagne, Macédoine, Croatie et Turquie, ce qui a conduit à relever de réels défis en matière d'expérience et de langues. Outre la formation et la préparation à l'action, les participant/e/s ont rédigé une déclaration publique.

En 2003, en Israël, un séminaire plus ou moins public a été ajouté au programme. De nouveau, la formation à la non-violence associée à la préparation à l'action formaient la plus grande part des activités de la semaine. Pendant la formation à la non-violence, les participant/e/s ont étudié la non-violence, le pouvoir, des outils non-violents pour analyser le pouvoir et l'élaboration de campagnes non-violentes. Tout cela a ensuite été mis en pratique pour préparer une action pour le 15 mai.

Il y a eu des discussions animées sur l'objectif de l'action – dans quelle mesure devait-elle être centrée sur l'occupation des Territoires, ou sur l'objection de conscience, ou sur la militarisation en Israël. Finalement, un consensus a été trouvé sur un ensemble d'objectifs principaux : mettre en avant la journée internationale de l'objection de conscience et l'objection de conscience en tant que campagne internationale, développer la connaissance du rôle joué par l'armée dans la vie quotidienne en Israël, ne pas attaquer les soldats et réaliser une action qui pourrait en inspirer d'autres.

En 2004, l'événement s'est déroulé au Chili – et la langue principale de la réunion était l'espagnol. Le format de l'événement a été une nouvelle fois similaire à celui de l'année précédente, mais sa dynamique était très différente, de nombreux participant/e/s venant d'Amérique latine. Il a été démontré que la formation et la préparation de l'action constituaient ensemble une part importante de l'expérience d'apprentissage.

Avec la Grèce, l'événement est revenu en Europe en 2005. Une fois encore, formation et préparation conjointes à l'action ont pris une grande part à l'événement.

En 2006, la Journée internationale de l'objection de conscience s'est déplacée aux États-Unis. Là, l'attention s'est centrée sur l'échange d'expérience dans le cadre d'un séminaire, et moins sur l'action. Cela a été dû en partie au fait que, de nombreuses actions étant déjà programmées pour le même jour, il n'a pas semblé profitable d'en ajouter encore une.

En Colombie en 2007, les activités ont inclus un concert antimilitariste, une rencontre internationale, principalement centrée sur l'organisation et des débats autour de la solidarité internationale pour les objecteurs de conscience colombiens, et une action le 15 mai dans la ville de Medellín.

Défis

Les événements confrontent à des défis à plusieurs niveaux. Je ne vais pas aborder ici le plus grand d'entre eux, la recherche de fonds pour ces occasions, cette question allant au-delà de l'objet de ce livre – même si les finances ont un impact énorme sur l'événement lui-même. Parmi les autres défis : Prise de décision : comment décider de l'orientation et du pays pour chaque année ? Organisation : l'organisation de l'événement en coopération entre le bureau de l'IRG et le groupe local hôte.

Programme/Formation/Action : comment répondre aux besoins du groupe local hôte mais aussi des participant/e/s internationaux ?

Personne isolément ne serait en mesure de proposer une évaluation correcte complète de ces trois points. Au lieu de cela, je souhaiterais présenter quelques réflexions.

Prise de décision

Comme suite à la disparition de la Rencontre internationale pour l'objection de conscience (ICOM) à la fin des années 1990, l'Internationale des résistant/e/s à la guerre a assumé la coordination de la Journée en 2001. Cependant, il n'existait pas de réseau d'objecteurs de conscience pouvant décider de l'orientation pour l'année suivante – ce qui est encore aujourd'hui un problème. Au début, cette décision est retombée sur le bureau et les organes exécutifs de l'IRG. Après le 15-mai en Israël, des tentatives ont été menées (sans succès) pour impliquer des participant/e/s aux journées annuelles précédentes dans le processus de prise de décision (et ce, par l'intermédiaire d'une liste de diffusion électronique).

Il a été ensuite proposé d'impliquer, dans la mesure du possible, le Conseil de l'IRG dans le processus de prise de décision, à l'occasion de sa réunion annuelle. Cependant, en raison du manque de représentation de militant/e/s de l'objection de conscience au sein du Conseil, cela n'a pas plus été un succès. La décision repose à présent sur la commission du Programme de l'IRG pour le droit à refuser de tuer.

Il est clair que ce processus de prise de décision n'est pas satisfaisant. Il met le doigt sur le manque d'un véritable réseau international de mouvements pour l'objection de conscience, non seulement au sein de l'IRG mais également au-delà.

Organisation

L'organisation d'un tel événement n'a pas toujours été facile. En 2002, la plus grande part de l'organisation internationale est revenue au bureau de l'IRG, l'hôte belge se chargeant surtout de la logistique. Les années suivantes, les hôtes ont joué un plus grand rôle dans l'organisation de l'événement, y compris au niveau du programme.

Les différentes échelles temporelles ont souvent constitué une des plus grandes difficultés. Alors qu'un tel événement, sans oublier son financement, nécessite de plusieurs mois à une année de préparation, les groupes locaux travaillent généralement à une échéance de quelques semaines, ou au mieux de quelques mois.

Plus fondamental encore est le problème de l'intégration du souhait international d'un événement annuel à une date donnée dans les stratégies des campagnes locales, en s'assurant que l'action internationale contribue à un élan local en cours et ne soit pas seulement un élément ponctuel de « tourisme militant ».

Programme/Formation/Action

Lors de l'événement de la première journée internationale de l'objection de conscience organisée par l'IRG, il n'y avait guère de programme formel, et le temps avait été essentiellement utilisé pour échanger des expériences, se former et se préparer à l'action. Les années suivantes, un séminaire a été ajouté au programme, pour répondre au besoin exprimé par le groupe hôte local que l'événement comporte une facette plus « publique » (au-delà de l'action).

Il y a toujours eu une tension entre trois aspects différents : le partage d'information et d'expériences sur les campagnes des autres, un séminaire public et la formation/préparation pour une action conjointe. Avec l'évolution vers un programme plus défini et public, incluant un séminaire, il était souvent possible de présenter l'expérience de différents pays lors du séminaire public. Cependant, les choses que d'autres militant/e/s savent déjà – et plus encore celles qu'elles/ils veulent savoir – sont souvent très différentes de ce qu'attendent d'autres participant/e/s au séminaire.

La formation et la préparation pour une action prennent beaucoup de temps. Même si le fait de travailler concrètement ensemble à la préparation d'une action est une expérience valable, et un bon exercice pour construire un groupe, cela laisse peu de temps disponible pour d'autres discussions. La question a été posée : est-ce le meilleur usage à faire du temps passé ensemble ? L'action elle-même peut conduire à des tensions. Quelles sont les attentes des hôtes locaux ? Quels sont les risques conséquents pour les militant/e/s locales/-aux, et pour les participant/e/s internationaux ? Quelles sont les sensibilités locales ? Cela prend beaucoup de temps, et d'écoute mutuelle, de parvenir à la compréhension de problèmes potentiels dans une certain forme d'actions, ainsi que de parvenir à un consensus sur le type d'action. Vu sous cet angle, un délai de quelques jours n'est pas long, à plus forte raison lorsque le même moment doit être consacré à la préparation la plus concrète – confection de banderoles et de tout matériel nécessaire pour l'action.

Remarques conclusives

Il convient de dire que, en lignes générales, ni aucune des actions, ni aucun des événements n'ont été parfaits. Il n'a jamais été possible de relâcher toute la tension, quoique, généralement parlant, les participant/e/s et les oganisatrices/-teurs ont toujours gardé une impression positive après l'événement.

Pour ma part, j'ai le sentiment que la partie dédiée à la formation est importante, et je pense qu'il est regrettable qu'elle n'ait pas figuré au programme des deux dernières années (2006 et 2007). C'est vrai, nous avons souvent essayé d'en faire trop en trop peu de temps, mais la formation et la préparation en commun d'une action ont joué un rôle important pour une meilleure compréhension des perspectives politiques et des cultures d'action des autres.

Le défi reste encore de combiner cela avec une durée plus longue permettant un échange plus complet d'expériences de campagnes, si nous voulons apprendre les uns des autres en tant que militant/e/s pour l'objection de conscience.

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1) Quelques organisatrices/-teurs et l'ensemble des formatrices/-teurs devraient se rencontrer très à l'avance pour préparer la formation. En fonction de la situation, il se peut que les organisateurs doivent retourner vers le groupe pour prendre de nouvelles décisions en la matière. Les questions posées par les formatrices peuvent aider les organisateurs à comprendre ce qu'il leur faut faire pour préparer le groupe à la formation.

2) Discuter du temps nécessaire pour atteindre les objectifs de la formation. Peut-on la mener sur une seule journée (combien d'heures ?) ou sur un week-end ? La formation peut-elle se dérouler par étapes, suivant le processus d'élaboration de la campagne ? Une série de formations vous est-elle nécessaire pour préparer une campagne ? Certains groupes consacrent une semaine de vacances à la planification et à la préparation d'une campagne. Si des personnes doivent voyager pour rejoindre le groupe, comment pouvez-vous prendre la chose en compte pour la formation ?

3) Les formatrices/-teurs doivent avoir des informations sur les participant/e/s : s'agit-il de personnes qui se réunissent uniquement pour cette action donnée ou se retrouvent-elles régulièrement ? Quel est leur niveau d'expérience ? Ont-ils déjà participé à de telles formations ? Ont-elles déjà participé à des actions non-violentes, et si oui de quel type ?

4) Débattre de l'approche qu'a le groupe de la non-violence et de la formation. Le groupe a-t-il établi des « lignes directrices » (voir p. ) ?

5) Demander aux organisateurs de présenter des informations portant spécifiquement sur la campagne pendant la formation (par exemple des scénarios envisageables, l'arrière-plan sous-tendant la campagne...). Être clairs sur le temps dont on disposera pour ce faire.

6) Identifier la documentation nécessaire ; utiliser cartes et images, le cas échéant.

7) Établir clairement qui se charge d'apporter les fournitures (marqueurs, papier, adhésif, photocopies de documents, exemplaires du manuel, matériel pour filmer, etc.) et prévoir des solutions pour les repas et autres nécessités physiologiques.

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Milan

J'ai participé à quatre de ces marches et me suis impliqué dans l'organisation de trois d'entre elles : 1983 à Bruxelles contre l'IDEE (salon de la défense électronique), 1984 à Grebenhain (Fulda-Gap, blocage de manœuvres militaires) et 1985 au Danemark (contre les armes nucléaires).

Mon premier blocage s'est déroulé en 1979 à Ramstein. Nous étions organisés en groupes d'affinité, prenant les décisions par consensus et avec une commission de porte-parole (un « porte-parole » pris dans chacun des groupes). Presque tous les camps, marches et actions plus importantes qui ont suivi ont été organisés de la sorte. Cela donnait l'impression que cette idée d'organiser l'action directe non-violente par des voies non hiérarchiques était plus largement acceptée, mais celLa Marche internationale non-violente pour la démilitarisation (MID) a été un événement annuel en Europe de 1976 à 1989, qui a contribué à répandre l'idée d'une organisation par groupes d'affinité et utilisant la formation à la non-violence et la prise de décision par consensus.a pourrait être aussi simplement que c'était à ce genre d'événements-là que je choisissais d'assister.

En 1982, j'ai participé à ma première « formation pour formateurs », où nous en avons appris plus sur le système du groupe d'affinité et de la prise de décision par consensus. Dans les années 1980, il y avait une demande importante pour les formations non-violentes et l'un des thèmes habituels était : « Les voies non hiérarchiques d'organisation de l'action directe non-violente ».

L'aspect interculturel des MID m'a paru très stimulant et je pense que de nombreux participants étaient enthousiastes à l'idée de rentrer chez elles/eux pour diffuser ces formes et ces notions d'organisation. Nous pouvions aussi profiter de l'attraction exercée par un événement international pour aspirer à rencontrer plus et d'autres personnes que cela ne se serait produit avec un événement organisé à un niveau purement local.

Nous avons également associé des thèmes à ces marches. Par exemple, j'ai étudié pour ma part la Gestalttherapie comme un moyen de confronter les uns aux autres des modèles personnels qui restreignent notre créativité. Cela se produit aussi aujourd'hui avec les camps et les actions contre les réunions du G8. Comme un journaliste l'a souligné, « l'impact politique le plus important de ces journées se produira quand ces jeunes personnes rentreront chez elles, de retour à la vie 'normale' – modifiées par cette expérience, stimulées et nourries par les actions qu'elles ont menées et par le soutien qu'elles ont reçu ».

Une bonne expérience est pareille à une graine qui repose un moment dans un sol fertile avant de germer pour devenir peut-être une belle fleur ou un légume nourrissant. Pour moi – et je pense que pour beaucoup d'autres –, les MID ont semé de telles graines.

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Joanne Sheehan et Eric Bachman

La marche de dix-huit personnes sur le site du chantier de la centrale nucléaire de Seabrook dans le New Hampshire, le 1er août 1976, a été la première action directe non-violente collective aux États-Unis contre l'énergie nucléaire. Beaucoup d'opposants au nucléaire jugeaient trop radicale une telle tactique. Plus tard ce mois-là, lorsque 180 personnes avaient fait acte de désobéissance civile sur le site, les organisatrices/-teurs – la Camshel Alliance – ont recouru pour la première fois à la formation à la non-violence et à la structure des groupes d'affinité. Ultérieurement, ces éléments deviendraient familiers et seraient pratiqués partout dans le mouvement pour le changement social par la non-violence. Le 30 avril 1977, plus de 2 400 personnes occupaient le site, organisées en centaines de groupes d'affinité. Les deux jours suivants, 1 415 d'entre elles étaient arrêtées et beaucoup ont passé deux semaines en prison. Cette action a été une inspiration pour le mouvement contre le nucléaire et elle a créé un nouveau modèle international pour l'organisation des actions, incluant une formation à l'action directe non-violente et à la prise de décision par consensus au sein d'une structure non hiérarchique de groupes d'affinité.

L'inspiration pour l'action de Seabrook était en fait venue d'Europe. Au début des années 1970, des personnes en Allemagne et en France s'étaient inquiétées d'un projet de construction d'une centrale nucléaire à Whyl, en Allemagne. Près de là, de l'autre côté de la frontière, une société allemande avait fait part de son intention de construire une usine chimique au bord du Rhin à Marckolsheim (France). Les habitants de Whyl et Marckolsheim ont résolu de coordonner leurs actions dans une campagne internationale et elles/ils ont fondé en août 1974 une organisation conjointe, un comité international réunissant 21 groupes environnementaux des régions de Baden (Allemagne) et d'Alsace (France). D'un commun accord, elles/ils ont décidé d'occuper ensemble le premier des deux sites, quel qu'il soit, où les travaux débuteraient, afin d'interrompre le chantier.

Le 20 septembre 1974, alors que des ouvriers avaient commencé à édifier une palissade pour l'usine de Marckolsheim, des femmes sont venues se glisser dans les trous destinés aux poteaux et elles ont stoppé l'opération. Les militant/e/s ont dressé une tente, d'abord à l'extérieur de la ligne de clôture puis rapidement à l'intérieur, et ils ont occupé le site. Le soutien pour la campagne est venu de nombreux endroits. La revue allemande anarcho-pacifiste Graswurzelrevolution (GWR) avait contribué à diffuser l'idée d'actions non-violentes de terrain. Un groupe local de Fribourg (Allemagne), non loin des chantiers prévus, a présenté la non-violence active aux personnes qui s'organisaient à Whyl et à Marckolsheim. En 1974, un atelier de trois jours à Marckolsheim incluait une formation à la non-violence ; 300 personnes ont pratiqué des jeux de rôles en se préparant à ce qu'il fallait faire si la police arrivait.

Les gens des deux côtés du Rhin – fermiers, femmes au foyer, pêcheurs, enseignants, naturalistes, étudiants et autres – ont bâti une « Maison de l'amitié », ronde et en bois, sur le site. L'occupation s'est poursuivie à Marckolsheim tout du long de l'hiver, jusqu'à ce que le gouvernement français annule le permis de construire de l'usine, le 25 février 1975.

Pendant ce temps, la construction du réacteur nucléaire à Whyl en Allemagne avait commencé. Après quelques jours, la police a mis un terme à la première occupation du site, qui avait débuté le 18 février 1975. Après une marche transnationale de 30 000 personnes le 23 février, le chantier de Whyl a été occupé une deuxième fois. Stimulés par le succès de Marckolsheim, les militant/e/s, parmi lesquels des familles entières de la région, ont poursuivi l'occupation pendant huit mois. Plus de vingt ans de batailles légales ont finalement mis fin au projet de construction de la centrale nucléaire de Whyl.

L'été 1975, deux militant/e/s des États-Unis, Randy Kehler et Betsy Corner, ont visité Whyl après avoir assisté à la Triennale de l'Internationale des résistant/e/s à la guerre aux Pays-Bas. Ils avaient apporté le film Lovejoy's Nuclear War, l'histoire de la première action individuelle de désobéissance civile non-violente contre une centrale nucléaire aux États-Unis ; ils ont rapporté aux États-Unis, et aux personnes qui s'organisaient pour stopper la centrale de Seabrook, l'histoire stimulante des occupations communautaires allemandes. D'autres échanges d'information ont suivi. Pendant l'occupation de Seabrook en 1976, des militant/e/s de l'IRG en Allemagne avaient un contact téléphonique quotidien avec la Clamshell Alliance. Les militant/e/s non-violents allemands avaient utilisé le consensus, mais la structure par groupes d'affinité était pour elles/eux quelque chose de nouveau, qu'elles/ils voyaient comme une très bonne méthode pour organiser des actions.

En 1977, les formateurs et militants allemands Eric Bachman et Günter Saathoff ont réalisé une tournée d'interventions orales aux États-Unis, rendant visite aux groupes antinucléaires du nord-est des États-Unis, ainsi qu'à des groupes luttant en Californie contre un projet de centrale à Diablo Canyon. Des militant/e/s des deux côtés de l'Atlantique ont poursuivi ce processus d'enrichissement réciproque.

Les usines de Marckolsheim et de Whyl n'ont jamais été construites. Même si un des deux réacteurs prévus a été construit à Seabrook, aucune nouvelle centrale nucléaire n'a été lancée depuis lors. Whyl et Seabrook ont été des références importantes pour le mouvement contre le nucléaire et ont encouragé beaucoup d'autres campagnes du même ordre.

La Clamshell Alliance à Seabrook, elle-même inspirée par des actions en Europe, est devenue à son tour une source d'inspiration pour d'autres groupes aux États-Unis et en Europe. Aux États-Unis, le travail de Seabrook a inspiré la campagne réussie pour stopper la centrale nucléaire de Shoreham à Long Island (New York), qui était déjà construite à 80 %. Tout a commencé quand un groupe d'affinité de membres de la War Resisters League est rentré de l'occupation de Seabrook et a commencé à s'organiser en interne. Des militant/e/s anglais qui avaient participé en 1977 à l'occupation de Seabrook, avec des militants qui en avaient entendu parler dans Peace News, ont décidé de promouvoir cette forme d'organisation en Grande-Bretagne. Cela a donné lieu à la Torness Alliance, qui s'est opposée au dernier projet de site nucléaire en terrain vierge, dans le sud-est de l'Écosse. En Allemagne, un certain nombre de centrales nucléaires et d'usines de retraitement du combustible nucléaire ont été empêchées ou fermées en raison des protestations croissantes. Au début des années 1980, des actions non-violentes d'envergure, qui ont recouru au modèle des groupes d'affinité, se sont déroulées en Grande-Bretagne comme en Allemagne contre l'installation de missiles de croisière états-uniens. Et l'histoire a continué, des groupes d'affinité étant utilisés dans le cadre de nombreuses actions non-violentes dans le monde (y compris à l'occasion de sit-in à Seattle en 1999, contre la réunion de l'Organisation mondiale du commerce).

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Transmettre le message de protestation – Rendre une action efficace

Jørgen Johansen et Brian Martin

Qu'est-ce qui rend une action efficace ? Les organisatrices/-teurs ont beaucoup d'options possibles à leur disposition : quoi, quand, où, comment et qui. Envisager la façon dont les publics sont susceptibles de réagir aux messages peut vous fournir une orientation.

Les poids lourds du gouvernement rendent visite à notre ville. Organisons une manifestation ! Il y aura un rassemblement massif et une marche. Celles/ceux qui le souhaitent peuvent bloquer la visite. Nous allons donner un large écho à nos préoccupations sur les inégalités, l'exploitation et toute sorte d'agressions.

Attendez une seconde. Ce genre de protestation va-t-il être efficace ? Va-t-il changer les points de vue des personnes, mobiliser des soutiens et contribuer à faire émerger une société meilleure ? Ou va-t-il plutôt renforcer des préjugés, nous aliéner des partisans potentiels et pomper de l'énergie pour des initiatives plus efficaces ?

D'ailleurs, que signifie « être efficace » ?

Il n'y a pas de réponses simples à ces questions. Les actions ont des portées très variées. Certaines sont difficiles à jauger et d'autres passent complètement inaperçues. Il est difficile de peser le pour et le contre : c'est une appréciation aussi émotionnelle que rationnelle.

Contexte

Les actions doivent être conçues en gardant à l'esprit le contexte. Ce qui est idoine dans une situation peut être absolument contre-productif dans une autre. Les lois, les médias, la police, la culture, la religion, la société civile et bien d'autres facteurs sont tout à fait différents au Burkina Faso, en Allemagne, au Népal, en Indonésie ou en Chine.

En 1930, Gandhi a choisi de bâtir une campagne en Inde autour du sel, qui était un symbole fort pour les Indiens à cause des lois britanniques sur la question. Quel symbole fort pourraient utiliser aujourd'hui des protestataires au Swaziland ou en Suède ? Les actions doivent être conçues avec une connaissance profonde des conditions locales. En règle générale, les histoires de succès ne doivent jamais être copiées, mais elles peuvent servir de sources d'inspiration et comme des exemples utiles desquels apprendre.

Les grèves de la faim illimitées sont reçues très différemment dans la culture chrétienne et dans une société hindoue. Pour les chrétiens et les athées, sacrifier sa vie a une signification considérable, tandis qu'un hindou prévoit qu'il lui reste des milliers de vies à venir – ce n'est pas un détail ! Dans un pays où un/e militant/e risque la torture, un long emprisonnement ou la peine de mort, la désobéissance civile est une autre affaire que si l'issue vraisemblable se limite à une amende ou à quelques semaines d'hébergement dans une prison décente. Il est sage que les militant/e/s agissent différemment dans les pays où la censure est rigoureuse et les médias contrôlés par l'État et dans ceux où des médias libres d'opposition couvrent régulièrement les protestations.

Options

Il existe deux grandes catégories d'actions : s'opposer et promouvoir. La première met l'accent sur ce avec quoi les organisatrices/-teurs sont en désaccord et la seconde sur les solutions alternatives qu'elles proposent. De nombreuses options existent à l'intérieur de chacune de ces catégories. Dans la majorité des cas, il est beaucoup plus facile de générer une image positive quand une alternative peut être construite. Il est courant et facile de dire « Non ! », mais cela souvent considéré comme vain ou comme un frein au progrès. Présenter des alternatives est plus exigeant, mais cela permet souvent d'être tenu pour constructif.

À l'intérieur de chacune de ces catégories principales se présente à nouveau un choix : action directe ou action indirecte. L'action directe signifie que les militant/e/s elles/eux-mêmes feront quelque chose lié au problème ou au conflit. Il pourrait s'agir par exemple de couper l'accès à une rue dans une ville pour transformer celle-ci en un espace piétonnier. Ou cela pourrait être d'occuper une maison pour la transformer en centre culturel. Quand des participant/e/s de la campagne Genetix Snowball détruisent des plantes génétiquement modifiées dans des champs en Grande-Bretagne, elles ne réclament pas seulement que ces champs soient déclarés illégaux, elles enlèvent les plantes elles-mêmes. Les actions de ce genre sont souvent illégales et risquées. Leur particularité est que les militants réalisent eux-mêmes directement le changement qu'ils prônent : ils mènent une action directe. Les actions indirectes incluent une démarche auprès d'autres personnes, comme des élus ou des dirigeants d'entreprises, pour qu'elles répondent à une sollicitation ou portent remède à une situation injuste. Remarquons que, dans une dictature, présenter une demande peut être une forme d'action directe, car cela représente l'exercice de la liberté d'expression.

Pour les actions directes autant qu'indirectes, il est nécessaire de développer une variété d'actions. La créativité, la fantaisie et les expérimentations sont cruciales. De même que les fabricants d'armes présentent chaque année des engins plus sophistiqués, les militants doivent développer de nouvelles formes d'action. Des exemples valables doivent être testés, notés et adaptés afin de pouvoir y recourir dans des lieux, temps et circonstances différents.

Publics

Pour bien des questions, il y a trois groupes principaux : militant/e/s, adversaires et tierces parties. Lorsqu'un groupe veut défier un gouvernement répressif, les militantes sont celles qui sont mêlé/e/s aux protestations. Les adversaires sont le gouvernement et ses services, comme la police et l'armée. Les tierces parties sont ceux qui ne se mêlent pas directement à la lutte : le public au sens large et beaucoup de gens dans d'autres pays. Les personnes peuvent passer de tierce partie à militant, et réciproquement, à la suite de certaines actions. L'un des objectifs est de faire participer plus de monde. Dans la plupart des cas, les médias sont des vecteurs d'information ou de propagande et ils transmettent les messages de l'action à des audiences plus larges.

Flecha p. 60

Pour analyser la place occupée par chacun/e, voir l'exercice « Spectre des alliés », p.  ; pour plus d'information sur les médias, voir « Le rôle des médias », p. . Correspondance entre méthodes (médium) et public

Tout comme de se demander qui sont les publics, il est utile de se pencher sur l'interaction entre les méthodes militantes et ces publics. Le grand prêtre des médias Marshall McLuhan disait que « le message, c'est le médium ». Par exemple, la télévision suggère un certain point de vue sur le monde, indépendamment de ce que montre l'écran. La conversation privée favorise une perspective différente. Dans l'action militante, également, le médium – concrètement, la méthode d'action – est le message. Selon une approche appelée par la psychologie « théorie de l'inférence correspondante », les publics font des suppositions sur les motivations de quelqu'un en fonction des conséquences de l'action menée. Lorsque des militant/e/s menacent de faire usage de la violence – par exemple en recourant aux bombes, aux assassinats ou aux enlèvements –, de nombreuses/-x observatrices/-teurs croient que l'objectif de ces militant/e/s est de détruire la société. La méthode, nommément destructive, est tenue pour refléter l'objectif. Après le 11-septembre, par exemple, beaucoup de gens aux États-Unis ont pensé que l'objectif d'Al-Qaïda était de détruire la société états-unienne. Ce n'était pas le bon message. Très peu de citoyen/ne/s du pays savaient que les objectifs-clés d'Oussama ben Laden visaient la politique menée par le gouvernement des États-Unis dans le monde musulman.

Les mêmes considérations s'appliquent à une échelle beaucoup plus modeste. Si un/e travailleuse/-r appartenant à un piquet de grève crache sur un/e cadre de direction, il transmet un message de mépris et d'irrespect, qui peut distraire le public du message que la paie est trop mauvaise ou les conditions de travail dangereuses. Les actions ont plus de force quand la méthode utilisée – le médium – correspond au message. Lors du mouvement pour les droits civils aux États-Unis, des Noir/e/s bien habillé/e/s entraient dans des restaurants réservés aux Blanc/he/s et s'asseyaient poliment et calmement au comptoir, sans répondre aux insultes ni aux provocations de la police. Leur présence et leur comportement respectable ont adressé un message fort qui correspondait à leur objectif à court terme (l'égalité de l'accès aux restaurants), ainsi qu'à l'objectif à long terme de l'égalité raciale. Par ailleurs, les insultes des patrons blancs et l'action agressive de la police, exclusivement tournée vers les Noirs dans les restaurants, adressaient le message que la ségrégation était un système raciste, reposant sur l'exclusion et l'agression. Ces messages forts ont contribué à discréditer la ségrégation parmi les différents publics dans le reste des États-Unis et dans le monde entier.

Faire face à l'attaque

Les gens qui protestent sont souvent l'objet d'attaques : ils peuvent être diffamés, harcelés, battus, arrêtés, emprisonnés, voire tués. Leurs communications peuvent être interceptées, leurs bureaux envahis et leur matériel confisqué ou détruit. Ces attaques sont lessivées et onéreuses, elles portent atteinte au moral et peuvent affaiblir la participation. Mais avec une préparation et une tactique adéquate, et un peu de chance, certaines attaques peuvent être retournées vers les agresseurs. Ce n'est pas facile et cela n'arrive pas souvent, mais cela peut être un outil très puissant.

Les coupables et leurs partisans utilisent classiquement cinq méthodes pour contrer l'indignation née de leurs agissements : dissimuler l'attaque ; dévaluer la cible ; réinterpréter ce qui est arrivé (y compris en mentant, en minimisant les effets et en accusant les autres) ; utiliser des voies officielles pour donner une apparence de justice ; intimider et soudoyer les cibles et leurs partisans.

Par exemple, après que les forces de police ont attaqué des manifestant/e/s, la police et ses allié/e/s peuvent avoir recours à l'une ou l'autre de ces cinq méthodes.

La police, lorsqu'elle attaque des manifestant/e/s, essaie souvent de le faire loin des caméras et sans témoin. La police, les politiques et les commentatrices/-teurs dénigrent les manifestantes en les traitant de sans scrupules, menteurs, gamin/e/s mal élevé/e/s, agitateurs (manifestantes professionnelles), voyous, lie de la société, criminel/le/s ou terroristes.

Ils prétendent que la police a fait son travail, que les manifestant/e/s ont été violentes et qu'elles/ils ont troublé l'ordre public et qu'en fait c'est la police qui a été attaquée.

Quand les manifestant/e/s déposent plainte formellement ou se pourvoient en justice, il est rare que la police en subisse la moindre conséquence sérieuse. Le plus souvent, l'ensemble de la procédure dure si longtemps que la plupart des gens ne s'y intéressent plus, tandis que les militants s'empêtrent dans des considérations techniques qui les distraient de l'action militante.

Dans beaucoup de cas, les manifestant/e/s ne rapportent pas les faits publiquement par crainte de représailles de la police ; dans le cadre d'une action en justice, elles peuvent être conduites à accepter un arrangement, souvent assorti d'une clause de silence.

Chacune de ces cinq méthodes peut être battue en brèche.

Pour plus d'information sur les façons de faire face aux conséquences psychologiques, voir « Affronter le stress et l'épreuve de tenir une position », p. .

Conclusion

Quand on décide sur quoi, quand et de quelle façon protester, il est utile de penser aux publics et aux messages.

Contexte

Les actions doivent être conçues en ayant le contexte à l'esprit. Ce qui est approprié dans une situation peut être absolument contre-productif dans une autre.

Options

Il y a deux grandes catégories d'actions : s'opposer et promouvoir. La première met l'accent sur les désaccords avec une action/politique/etc. et l'autre sur une alternative.

Publics

Comment les publics et les méthodes des militant/e/s interagissent-ils ? Adversaires, tierces parties et militant/e/s elles-mêmes sont des publics importants.

Correspondance

Comment les méthodes des militants correspondent-elles aux objectifs militants ? Si la correspondance est élevée, il est plus vraisemblable que c'est le bon message qui sera reçu.

Attaques

Comment une attaque sera-t-elle perçue ? Il est vital d'être préparés pour contrer les méthodes de dissimulation, dévaluation, réinterprétation, recours aux voies officielles, intimidation et corruption.

Post-scriptum : documentation, évaluation et diffusion

Pour que leurs actions deviennent plus efficaces, les militant/e/s doivent apprendre des expériences du passé. Ils doivent noter par écrit et évaluer ce qu'ils font, et rendre ces informations disponibles pour les autres. (Voir « Évaluation de l'action », p. .) Tout comme les élèves étudient dans les collèges militaires le déroulement des batailles grâce à des conférences et des manuels, les militant/e/s doivent bâtir un système comparable pour que les générations prochaines puissent se nourrir de l'histoire des mouvements sociaux. Cela suppose des évaluations sérieuses et critiques de la préparation des actions, des actions elles-mêmes et de leurs résultats. Il est tout aussi important d'étudier les erreurs que de célébrer les victoires. Ces évaluations doivent être rendues disponibles pour les autres militant/e/s, en tenant compte des différents contextes et langues. C'est une tâche importante. Il y a beaucoup d'actions dont on peut apprendre !

Ces pages sont une version abrégée d'un article paru dans Gandhi Marg, vol. 29, numéro 4, janvier-mars 2008, p. 503-519. Vous pouvez consulter l'article complet (en anglais) à l'adresse http://www.uow.edu/arts/sts/bmartin/pubs/08gm.html.

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Comment un groupe pacifiste insère-t-il la conscience du genre dans son travail pacifiste ? Cela peut être à travers son identité et ses structures organisationnelles, sa formation et l'orientation de ses membres, ainsi que dans le cadre de l'élaboration de ses stratégies de programme.

L'organisation pacifiste israélienne New Profile se décrit comme « un groupe de femmes et d'hommes féministes convaincues que nous n'avons pas besoin de vivre dans un état soldat ». Une identification aussi claire expose d'emblée, pour quiconque entre en contact avec l'organisation, les liens existant entre le genre et la paix. New Profile brise les patrons organisationnels traditionnels en faisant tourner les responsabilités ainsi que toutes les tâches rémunérées, tout en essayant d'éviter d'établir une hiérarchie entre ses activités. Les multiples programmes de formation et d'éducation, destinés aux nouveaux membres et au grand public — ateliers, séminaires, groupes de jeunes et conférences —, comportent toujours une analyse de la façon dont le genre et le militarisme sont liés dans la culture et la société israéliennes. Le groupe anime également des cercles d'étude d'une journée entière pour se pencher plus profondément sur ces liens. En 2007, par exemple, une de ces journées d'étude recourait à des photographies de femmes soldates, extraites des archives de l'armée, pour s'intéresser au recrutement militaire des femmes en Israël et à la militarisation globale de l'ensemble de la société. Grâce à de telles possibilités d'étude et de débat, les membres de New Profile enrichissent d'une conscience genrée plus profonde leurs analyses du problème du militarisme et la planification de leurs actions stratégiques. Le projet de New Profile intitulé « Petits bras et armes légères »* ne se penchait pas seulement sur les problèmes et la structure du commerce des armes en Israël, mais étudiait aussi de quelle façon les armes légères affectaient la vie des individus et comment New Profile pouvait aider à redéfinir le terme « sécurité » dans la culture israélienne.

Notes

Adapté de documents créés pour le programme « Femmes créatrices de paix » du Mouvement international pour la réconciliation (http://www.ifor.org/WPP/index.html) et développés dans le manuel de formation du Partenariat international des femmes pour la paix et la justice (http://www.womenforpeaceandjustice.org/).

Pour plus d'information sur New Profile, voir l'article p. .

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« Les guerres cesseront quand les hommes refuseront de combattre — et les femmes d'accepter. » Jesse Wallace Hughan, fondateur de la War Resisters League

Notre souhait que les femmes et les hommes soient les unes et les autres impliqués dans nos combats contre la guerre et l'injustice peut paraître simple et évident. Pourtant, si nous voulons utiliser entièrement les talents, l'énergie et la variété des points de vue des personnes, il nous faut appliquer la conscience du genre à notre façon de nous organiser, de profiler nos campagnes et de mener nos formations à l'action.

Pourquoi ? Parce que le genre, les définitions que nos sociétés donnent des rôles masculin et féminin, de la masculinité et de la féminité, nous influencent tous et toutes. Et chacun/e d'entre nous a été affecté/e par les traditions sociales qui ont construit la masculinité comme dominatrice, agressive et exerçant le contrôle, et la féminité comme faible, soumise et vouée au service. La prise de conscience du genre contribue à nous assurer que, dans nos actions et campagnes non-violentes, nous ne perpétuons pas les injustices mêmes auxquelles nous essayons de mettre un terme.

Dans les campagnes antimilitaristes, la conscience du genre et les analyses fondées sur le genre sont aussi des outils valables pour élaborer une stratégie efficace. Le genre est un des éléments de tout conflit, quel qu'il soit. Il peut ne pas être la cause même du conflit, mais des idées différentes sur la masculinité et la féminité sont au cœur même des raisons pour lesquelles les gens se battent. Les systèmes militaires sont construits pour fonctionner à partir de certaines idées et préalables portant sur les rôles du masculin et du féminin. Si nous voulons créer des structures et des systèmes non-violents pour résoudre les conflits, il nous faudra créer de nouveaux préalables et de nouvelles attentes à propos du genre.

Dans cette section, nous incluons des concepts et des exercices pour vous aider à intégrer la conscience du genre dans vos formations et à examiner vos campagnes et actions non-violentes à travers des lunettes genrées.

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